EBOLA - Les trois pays d'Afrique de l'Ouest frappés de plein fouet par Ebola se retrouvaient mercredi 27 août de plus en plus isolés face à l'épidémie, les dernières compagnies aériennes encore présentes ayant suspendu leurs vols. Face à l'inquiétude croissante dans le monde, Air France a annoncé la "suspension provisoire", à compter de jeudi 28 août, de ses vols vers Freetown, mais poursuivra ses liaisons avec la Guinée et le Nigeria, en conformité avec une recommandation du gouvernement. français.

Seules deux compagnies desservent encore la la Sierra Leone et le Liberia : Royal Air Maroc (RAM) et Brussels Airlines, de manière irrégulière pour cette dernière.

Brussels Airlines, qui maintenait quatre vols hebdomadaires vers le Liberia et la Sierra Leone, et trois vers la Guinée, dont plusieurs ont été annulés depuis samedi en raison de la fermeture des frontières sénégalaises, a indiqué qu'elle prendrait une décision en fin de semaine. Dans l'immédiat, pour répondre à la demande de passagers et acheminer 40 tonnes d'aide médicale de l'ONU, la compagnie

British Airways avait annoncé mardi prolonger jusqu'à la fin de l'année la suspension de ses liaisons avec le Liberia et la Sierra Leone. Seule la compagnie Royal Air Maroc a confirmé ses plans de vol habituels : un par jour vers Conakry et un jour sur deux en moyenne vers Monrovia et Freetown, par "solidarité" africaine.

Des difficultés à acheminer le matériel

La "très ferme requête" du coordinateur de l'ONU contre le virus Ebola, le Dr David Nabarro, pour que des compagnies aériennes continuent à desservir les capitales des pays touchés a donc rencontré peu d'écho. Le Dr Nabarro avait averti lundi à Freetown que "la décision compréhensible de certaines compagnies aériennes de ne plus desservir Freetown, Monrovia ou Conakry avait eu un énorme impact sur la capacité de l'ONU à acheminer du personnel et du matériel".

Une centaine de tonnes de matériel de santé et d'hygiène financées par la Banque mondiale ont néanmoins été livrées mardi au Liberia par l'Unicef. Le président gambien Yahya Jammeh a pour sa part fait don à la Sierra Leone de 500.000 dollars (environ 380.000 euros), a rapporté la télévision d'Etat.

"En des moments comme celui-ci, nous attendons des pays africains et des organisations comme la Cedeao (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest) et l'Union africaine qu'elles resserrent les rangs et fassent preuve de la même solidarité que le président de Gambie", a commenté le chef de l'Etat, Ernest Bai Koroma.

La Grande-Bretagne a également offert 10 millions d'euros pour les services de lutte contre Ebola, selon l'ambassadeur en Sierra Leone, Peter West. Le Dr Nabarro poursuivait mercredi sa visite, au Nigeria, le moins touché par Ebola.

 

A l'occasion de sa rencontre avec Dr Nabarro, le président nigérian, Goodluck Jonathan, a condamné mercredi la stigmatisation qui frappe le Nigeria, dénonçant le fait que l'équipe nigériane a été contrainte de se retirer des Jeux olympiques des jeunes en Chine après une décision du Comité international olympique bannissant les équipes des pays touchés par Ebola pour les sports de combat et la natation. Le pays le plus peuplé d'Afrique restait néanmoins vigilant, reportant la rentrée des classes d'un mois pour mettre en place "des mesures préventives" contre l'épidémie.

Par ailleurs, un expert sénégalais de l'OMS contaminé en Sierra Leone a été admis mercredi dans un hôpital de Hambourg, devenant le premier malade d'Ebola traité en Allemagne, et le troisième en Europe. En RDC, les Nations unies ont annoncé avoir déjà débloqué 1,5 million de dollars contre l'épidémie qui s'est déclarée en août, faisant 13 morts, distincte de celle qui sévit en Afrique de l'Ouest, selon les autorités sanitaires.

Un bilan sans doute plus lourd qu'on ne le pense

Alors que le virus a fait plus de 1400 morts sur 2615 cas enregistrés dans la région, au Liberia, le pays le plus touché, le directeur des Centres fédéraux américains de contrôle et de prévention des maladies (CDC), Tom Frieden, a averti que le bilan était probablement bien plus lourd. "Le monde n'a jamais vu une épidémie d'Ebola comme celle-ci. Par conséquent, non seulement les bilans sont élevés, mais nous savons qu'il y a beaucoup plus de cas que ceux diagnostiqués ou signalés", a-t-il déclaré à Monrovia.

"Le nombre de cas augmente", a estimé le Dr Frieden, en mission dans le pays depuis plusieurs jours, ajoutant que la situation allait continuer à empirer à court terme. L'épidémie, qui s'est déclarée au début de l'année en Guinée, avant de se propager au Liberia et à la Sierra Leone, pays voisins, puis au Nigeria, est la plus grave depuis que cette fièvre hémorragique a été identifiée en 1976 en République démocratique du Congo (RDC), où elle est réapparue en août pour la septième fois.