La condition féminine a été abordée au cours du sommet États-Unis-Afrique. Les différentes interventions bousculent bien des idées reçues. Nkosazana Dlamini-Zuma est intervenue lors de la table ronde consacrée à la condition des femmes au cours du sommet USA-Afrique.

"Valoriser davantage les jeunes filles et permettre aux femmes d'accéder à plus de responsabilités sont des éléments-clés en vue du développement du continent", un leitmotiv qui revient régulièrement au cours des différents sommets et forums économiques sur l'Afrique. C'est dire si le sujet est plus que jamais d'actualité. Le sommet USA-Afrique l'a encore montré au cours d'une réunion de hauts responsables africains qui s'est penchée lundi à Washington sur le sujet.

Une question de point de vue

Après des discussions autour des programmes d'aides et les différentes initiatives habituelles prises pour aider à améliorer la condition des femmes, les différentes personnalités politiques ont émis leur point de vue sur la question. L'un des avis les plus pertinents émis lors de cette table ronde a sans doute été donné celui de la porte-parole de l'Union africaine Nkosazana Dlamini-Zuma, médecin et ancienne activiste anti-apartheid en Afrique du Sud : quand vous voulez aborder le sujet des femmes, ne parlez pas aux hommes de leur épouse, mais parlez-leur de leurs filles.

De son côté, le président de la Banque mondiale Jim Yong Kim a souligné le lien étroit entre les stéréotypes et les attentes qui en découlent à l'insu des femmes elles-mêmes. "Par exemple, un groupe de jeunes filles asiatiques a beaucoup mieux réussi un test de sciences lorsqu'on leur a rappelé qu'elles étaient asiatiques, alors qu'elles ont été moins performantes quand on leur a rappelé qu'elles étaient des filles", a-t-il rappelé. Une expérience qui a d'ailleurs été conduite dans d'autres pays, avec les mêmes résultats.

Le rôle économique des femmes

Alors qu'en Afrique subsaharienne les femmes représentent plus de 50 % de la force de travail dans l'agriculture, elles ne sont que 3 à 20 % à être propriétaires des terres agricoles. Une inégalité qui peut être corrigée grâce à l'éducation, aux microfinancements ainsi qu'à l'accès aux équipements agricoles. Ici, l'argument est aussi économique. "Quand nous valorisons les filles et les femmes, nous maximisons la production, nous incitons à la création et nous nous plaçons en position de diriger", a rappelé Valerie Jarrett, une proche conseillère du président Barack Obama.

Les responsables politiques africains ont d'ailleurs montré leur bonne volonté, puisque, comme l'a rappelé Mme Jarrett, les dirigeants de cinq pays africains, Sierra Leone, Sénégal, Bénin, Maroc et Tunisie, se sont joints au président des États-Unis Barack Obama dans un projet ambitieux, le "Partenariat pour des futurs égaux", qui appelle les dirigeants à travers le monde à agir pour promouvoir la participation des femmes en politique.

 

"Aimer était illégal"

Si la condition des femmes a progressé sur le continent, les histoires dramatiques sont encore légion. Les Africaines sont régulièrement la cible d'exactions lors des conflits, comme l'a rappelé le président du Mali Ibrahim Boubacar Keïta, élu en 2013 après une insurrection des Touareg et des islamistes. "À cette époque, les femmes ont beaucoup souffert au Mali, subissant des viols ou diverses violences", a-t-il rappelé en parlant des abus des islamistes. "Chanter ou porter des jeans était considéré comme quelque chose de mal. Écouter autre chose que des musiques religieuses était criminel. Aimer était illégal. Vous pouviez être fouettée, lapidée... Durant cette période, les femmes ont été très dignes, elles se sont battues et elles ont refusé ces traitements qui leur étaient infligés, et donc elles méritent une meilleure vie", a encore lancé M. Keïta.

Des destins tragiques qui se vivent encore au quotidien. Jill Biden, la femme du vice-président américain Joe Biden, a cité des chiffres effrayants en République démocratique du Congo, où 1 000 femmes sont violées chaque jour, dont 60 % par plusieurs hommes à la fois. Les histoires des survivantes "fendent le coeur", mais, a-t-elle dit, durant un récent voyage dans ce pays durement éprouvé, elle a vu les femmes "transformer quelque chose qui nous aurait toutes détruites en une manière de s'aider les unes les autres".